Monday, February 19, 2007

Qu’est-ce qu’un bas-fourneau ?



photo@metallica2007
Qu’est-ce qu’un bas-fourneau ?

C’est un foyer dans lequel le féron réunit les conditions favorables à une réaction chimique. Cette réaction chimique consiste à isoler la molécule de fer des autres molécules qui lui sont associées au sein des minerais. Cela exige plusieurs étapes.
Premièrement la préparation des minerais.
Quelle que soit la nature de ces pierres que sont les minerais il faut les nettoyer des substances indésirables par chauffage (pour celles qui se transforment en gaz comme par exemple le soufre) par lavage pour celles qui se dissolvent dans l’eau.
Il faut aussi les transformer en oxydes magnétiques, car bien peu de minerais se présentent sous cette forme. Cela se fait par grillage et permet ensuite de poursuivre l’épuration et donc la concentration par aimantation.
On a ainsi obtenu un minerai magnétique, ce qui indique une forme particulière d’oxydes de fer nécessaires à la réduction du minerai en fer dont la formule chimique est Fe3O4.
Cette phase demande donc, cueillette du minerai, concassage, grillage, lavage, calcination, aimantation.

Deuxième étape , la réduction du minerai en fer.
Dans le foyer en forme de cheminée élevée en terre, briques ou pierres, pour la plupart des bas-fourneau utilisés dans tous les pays du monde, il s’agit de maintenir une température convenable (ni trop basse, ni trop haute, aux environs de 1100° au cœur du foyer ) et de provoquer la présence d’un gaz qui vient dépouiller le fer de l’oxygène qui lui est associé.
Le charbon de bois produit d’une part la température nécessaire d’autre part il s’associe à l’oxygène en créant du gaz carbonique.
Préchauffé pendant deux à trois heures, le bas fourneau est rempli de charbon de bois puis nourri régulièrement de minerai et de charbon afin de le maintenir plein pendant quatre à cinq heures.
Une alimentation en air par tuyère amène l’air nécessaire à la combustion.
Au cours de leur descente le long de la cheminée, les grains d’oxydes de fer libèrent leur oxygène et s’agglutinent au fond du bas-fourneau sous forme de grains de fer mous et pateux (jamais liquides). Ils s’amalgament progressivement et prennent une forme d’énorme lentille que l’on appelle loupe de fer.

Troisième étape, la transformation en lingot de métal.
Après quatre ou cinq heures de cuisson, il faut ouvrir la porte du bas-fourneau et sortir avec des pinces, la loupe qui repose au coeur du foyer rempli de charbon de bois incandescent. Aussi jaune que le soleil la loupe est extraite du four.
Elle peut ensuite être travaillée à chaud, par martelage au marteau pilon pour l’écraser et la transformer en lingot.
Elle peut aussi être forgée après refroidissement, et éclatement en parcelle pour pratiquer un feuilletage d’épuration. On obtient alors un lingot feuilleté.


Martine SERY

Rencontre exceptionnelle avec un Maître Forgeron1


Une image de la "Loupe" @cengizalpfévrier2007

L’année 1989 fut pour Christian Moretti celle d’un événement essentiel dans sa pratique professionnelle. Il avait jusqu’alors rencontré les métaux dans leur mise en œuvre. Cuivre, laiton, étain, plomb, fer et acier étaient devenus entre ses mains, chaudrons, fontaines, instruments de musique, lanternes, tuyauterie d’orgue, balustrade, ou grille de protection. Il aimait à prêter une forme aux métaux pour qu’ils deviennent à la fois utiles et beaux.
En juin 1989, à l’initiative du CCSTIFM (Musée de l’Histoire du Fer et Laboratoire d’Archéologie des métaux)et du GRMT (Groupe de Recherche sur la Métallurgie Traditionnelle)sont invités deux maîtres japonais, Maître Ono Masami et Maître Wakita Ryosui, qui viennent transmettre leurs connaissances des méthodes traditionnelles de fabrication des sabres japonais. Il s’agit cette fois de partir de la matière première, le minerai, pour aller jusqu’à l’objet fini, le sabre.
Christian Moretti découvre à l’issue de ce stage que sa véritable passion est la métallurgie artisanale. Art d’élaborer les minerais en métaux afin de réaliser un objet dont on a maîtrisé l’ensemble de la chaîne de réalisation. Pendant cette formation il put donc découvrir le fonctionnement d’un bas-fourneau, l’affinage des produits obtenus, la forge des lames japonaises, et le polissage. Il aime à dire qu’aujourd’hui encore il n’a pas fini d’exploiter et d’expérimenter ce qui lui a été transmis pendant ces quelque jours.
C’est donc dans ce même esprit qu’il aborde l’élaboration d’une arme japonaise. L’harmonie étant la clé indispensable pour une élaboration juste, il consacre son attention à la mise en phase de l’environnement, des éléments et du forgeron. Les minerais sont recueillis par lui-même et mélangés en fonction de la pièce à réaliser. Le charbon de bois, est soigneusement choisi, trié et calibré. Le jour de la réduction choisi avec attention. Les matières issues de la loupe sont ensuite sélectionnées précisément pour obtenir un métal d’une nuance précise. Puis l’alchimie de la forge prête enfin sa forme à la matière qui devient lame.
Un moment encore essentiel est celui de la trempe. Instant magique, instant à risque. Où la préparation des surfaces exposées plus ou moins violemment aux écarts de température structure le réseau des cristaux métalliques qui attribuera son caractère à la lame.
Avec les années qui passent et l’expérience qui s’acquiert, il consacre de plus en plus de temps à la phase de polissage. Entièrement à la pierre. C’est en effet la phase au cours de laquelle il sera possible de révéler la véritable identité de la lame. De lui donner à exprimer ou non son caractère. D’afficher son grain, sa force, sa souplesse, sa personnalité.
La naissance d’une lame est le fruit d’une série de gestes conscients et maîtrisés. Et, c’est pourquoi Christian Moretti, au delà de la réalisation des armes japonaises utilise maintenant ces techniques pour la plupart de ses pièces uniques car là est sans doute son plaisir profond, celui d’avoir donné naissance à une lame destinée à une arme ou un outil, qui porte en elle la sérénité de sa réalisation.
Christian Moretti

1- Années 1970, ouvrir la voie vers un artisanat authentique
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Chaudronnier, dinandier, ferblantier
Choix des matières, des outils et du geste artisanaux.
Positionnement clair et déterminé vers une activité et une philosophie artisanales qui laisse sa liberté à l’artisan qui la pratique.
Matière maîtrisée par la main de l’artisan, outils manipulés par la main de l’artisan. Formes uniques.
Seule chance pour l’artisan de ne pas se faire avaler par l’industrie et le commerce : la fabrication d’objets authentiques à forte valeur ajoutée.
Engagement dans la Corsicada mouvement artisanal englobant des artisanats de tous métiers. L’authenticité s’inscrit alors (nous sommes juste après 68) dans la culture locale et régionale .
Remettre à jour les racines culturelles et traditionnelles pour redonner vie à la création authentique.

2- 1985 ouvrir la voie vers la forge de lame, vers le renouveau du métier de fèvre coutelier
En 1985 le GRMT (Groupement pour la Recherche sur la Métallurgie Traditionnelle) fait venir Bill Moran au Musée du fer de Vallorbe en Suisse, et 15 stagiaires participent à cette formation qui porte sur la forge de lame et le feuilletage des aciers. Le GRMT étant placé dans une philosophie liée à la pratique des arts martiaux orientaux, la forge transmise pendant cette session en possède la rigueur et l’éthique.
Christian Moretti est de ceux-ci. Dès lors il adopte définitivement ces techniques qui vont dans le sens de sa propre éthique de l’artisanat. Il est l’un des premiers à exposer internationalement des pièces en aciers forgés main et feuilletés à Berne et Zurich, (avant même l’existence du SICAC).

3- 1989 ouvrir la voie vers le renouveau la métallurgie traditionnelle
E, 1989, toujours sous l’impulsion du GRMT et du celle du Musée de Nancy, un goupe d’adhérent du GRMT se cotisent pour faire venir du Japon deux maîtres japonais, Maître Ono Masami et Maître Wakita Ryosui, qui viennent transmettre leurs connaissances des méthodes traditionnelles de fabrication des sabres japonais. Il s’agit cette fois de partir de la matière première, le minerai, pour aller jusqu’à l’objet fini, le sabre.
Christian Moretti fait partie de ceux-ci et trouve enfin le moyen de l’indépendance totale de l’artisan fèvre coutelier: les compétences permettant de produire soi-même son acier.
Désormais toute son énergie est orientée vers l’acquisition de la maîtrise du procédé de réduction directe du minerai qui est le seul procédé qui peut être maîtrisé par un homme seul. Son objectif : être autonome dans la production de ses propres aciers.

4- 1990 ouvrir la voie vers le partage et la transmission des savoir-faire métallurgiques :Création avec Jo Antonini du CERM (Centre d’Ethnographie et de Recherche Métallurgique)

Objectif de l’association : centraliser les informations sur la géologie, l’histoire, la métallurgie de la Corse, lieu très ancien de métallurgie, pour créer un espace de partage et de transmission des savoir-faire anciens sur la métallurgie traditionnelle.
Ces recherches portent sur tous les métaux : fer et acier, cuivre, bronze, étain et plomb ….

5 – 2000 ouvrir la voie vers le renouveau du métier de féron

Chrisitan Moretti s’installe dans le Tarn et décide d’élargir son travail de transmission à l’ espace national. Il fonde Metallica, la sarl au sein de laquelle il s’exprime désormais. Il y dispense des formation de forge de coutellerie, et de métallurgie artisanale.
Des « férons » issus de cette formation seront validés chaque année.
Lutte quotidienne pour défendre le professionnalisme de ces métiers.
Pour éviter la vulgarisation de termes qui pourraient nuire à de futurs professionnels, courant 2002, il dépose auprès de l’INPI l’appellation « métallurgie artisanale » et le terme de « féron » réservé aux diplômés de Metallica.

6 – 2006 reconnaissance officielle
Depuis 2001 de nombreux professionnels ont été formés à Metallica et se sont installés à travers la France.
Mais Christian Moretti a aussi poursuivi son parcours d’artisan.
En 2005 il présente une canne-épée au concours « Pour l’Intelligence de la main » de la Fondation Bettencourt. Il est primé pour cette œuvre remarquable réalisée à parti de minerais de fer, de cuivre et de zinc.
Il forge aussi des katanas et d’autres grandes pièces pour des clients.

Le 15 février 2007, le ministre Arnaud Dutreil attribue à Metallica par décision ministérielle le label « Entreprise du Patrimoine VIvant ».
Ce label nouveau distingue et valorise les entreprises artisanales qui « fondent l’identité économique et culturelle française »

Christian Moretti, à travers Metallica peut poursuivre avec confiance son travail et ses recherches d’artisan et son accompagnement de formateur vers le renouveau des professionnels des métaux artisanaux..


Le fèvre est l’artisan qui élabore le métal en objet
Le féron est l’artisan qui transforme le minerai en métal.
L’œuvre de féron

« On n’insistera pas sur la sacralité du fer. Qu’il passe pour tombé de la voûte céleste ou qu’il soit extrait des entrailles de la Terre, il est chargé de sa puissance sacrée. » «(en se préparant à élaborer du fer) on a le sentiment de s’aventurer dans un domaine qui n’appartient pas de droit à l’homme, …on a surtout le sentiment de s’ingérer dans un ordre naturel régi par une loi supérieure, d’intervenir dans un processus secret et sacré…. on sent obscurément qu’il s’agit d’un mystère qui engage l’existence humaine »
Emprunter à Mircea Eliade ( Rites et mystères métallurgiques) quelques uns des mots qu’il a choisis pour parler des « forgerons et alchimistes » place d’emblée le sujet sur le niveau d’interrogations que suscite inévitablement le fait d’aborder la métallurgie du fer. Et si l’on décide de se détourner quelques instants de l’aspect industriel que la sidérurgie actuelle a dépouillé de son aspect céleste (sidéros en grec ) pour porter son attention sur l’aspect artisanal et universel de la métallurgie on en ressent immanquablement l’exigence précieuse et sacrée.
Pourtant.
Quoi de plus banal qu’un bas-fourneau. Simple cheminée élevée en terre, briques ou en pierres, ses dimensions à échelle humaine, se situant entre un ou deux mètres de haut, ne lui confèrent aucune prestance esthétique digne d’admiration.
Quoi de plus banal aussi qu’un minerai de fer, pierre parmi les autres, que l’on foule le plus souvent, ou que l’on utilise en fondations et remblais, inconscient de l’âme qui y sommeille.
Mais pourtant.
Qui peut prétendre rester indifférent en présence du déroulement alchimique d’une réduction de minerai de fer. Et à fortiori quel féron peut prétendre ne pas avoir été happé et bouleversé par sa fonction d’alchimiste accoucheur.
Depuis la nuit des temps, et en tous lieux du monde, l’homme chargé de la réduction du minerai de fer occupe une place particulière au sein de la société. Demi-dieu qui rivalise avec les dieux en fabricant les outils. Démon à part entière en fabricant les armes. Crainte et respect mêlés sont l’insigne d’un homme dont la société exige et reconnaît conscience et sagesse.
Où est le féron aujourd’hui.
En parcellisant les tâches l’industrie sidérurgique a dépouillé les hommes de leur capacité à maîtriser un processus. Vidant les gestes de leur objectif et de leur sens elle a doucement habitués ses ouvriers à accomplir des gestes déconscientisés, désengagés. Moyen puissant de potentielle et subtile manipulation.
Le bas-fourneau est outil d’artisan. Homme responsable de la totalité du processus. Responsable du métal qu’il élabore. Responsable de la couleur de la conscience qu’il insuffle au métal. Travail en conscience. Donneur d’âme. Choisissant seul de revêtir son personnage demi-dieu ou sa peau de démon.
En décidant de transmettre les savoirs de métallurgie qui lui ont été transmis, Christian Moretti se place volontairement dans la perspective de la renaissance de ce métier, de ce rôle. En actant vers la restitution de l’élaboration raisonnée et animée (du latin anima : âme) du métal à l’artisan.

Martine Séry
Le 5 février 2003

Sunday, February 11, 2007

HINKAKU

Bushido Compliance
Mar, 30. 2006

Recently, some books on Bushido have gone on to become the best sellers. One of them is “Bushido-A Bilingual & Illustrated version” (Mikawa Shobo), which has notes and commentary added to the classical masterpiece “Bushido” by Inazo Nitobe. And the other one is “Kokka no Hinkaku (Dignity of a Nation) (Shinchosha) by Masahiko Fujiwara. In 2003, the film “The Last Samurai” directed by Tom Cruise with Ken Watanabe in the lead role became quite popular. Bushido and Samurai seem to be the keywords when talking of modern Japan.

Fujiwara’s book that has already sold over 1 million copies is a criticism of excessive stress on rationalism and logicism. It positions “Emotions” and “Form” on the opposite end of the spectrum. Form is the criterion for behavior based on the spirit of Bushido. Fujiwara writes, “Excessive Americanization has made inroads not only in the economy but even in our society, culture and the national character”. He laments that the Japanese are no longer concerned about being called coward or vulgar.
It gives solace to those who are displeased with business restructuring, take-over, and vulgar prosperity and who feel that the present trend of “the survival of the fittest” as reflected in bundling of the people together into “the Winners and the Losers” is going too far. It also works as a tranquilizer for those who are vexed with the lack of manners among the youth and increase in the number of the so-called NEET (Not in Employment, Education or Training). On reading “The earlier Japanese were really marvelous people”, those who dislike antagonistic China and South Korea or powerful America must be feeling proud. There are definitely many factors in this book that make it the best seller.
On the other hand, there is also criticism that such spiritualism should be shunned as it leads to nationalism.
Inazo Nitobe’s Bushido was originally published in America in 1899 in English. It was entitled “Bushido – The Soul of Japan”. It evoked interest across the world and was translated into many languages such as German, French and Chinese. Its Japanese version was published in 1900. It used typical terms like Makoto (honesty), Chugi (Loyalty), Hinsei (Character), Seppuku (Hara-kiri) and the Yamato(Japanese) spirit.
Soon thereafter, Russo-Japanese war broke out in 1904, which ended in Japanese victory in 1905. The victory was attributed to the Bushido.
Tetsujiro Inoue, a philosopher, poet and a Professor of the Tokyo Imperial University of the time, and Sukemasa Arima, a thinker co-authored the book “Bushido Classics” in 3 volumes soon thereafter. Major Publisher and Hakubunkan also published several books on Bushido such as “Theory of Bushido”, “Bushido Percepts” in rapid succession. It was around 1907. After the Meiji Restoration, Bushido was indeed a popular concept as the “Dignity of Nation” during the process of building of the nation.
Bushido concept is said to have been adopted as the norm for the Imperial Army. Imperial Instructions for military were issued in 1882 and they were based on the Bushido. Norms that constituted the standards for the warrior class became the foundation for the military formed by the commoners. It had 5 pillars namely loyalty, etiquette, valor, faithfulness and frugality. It is impossible to assume that they alone led to victory in the Russo-Japanese war but the basis for the argument that Bushido was behind the victory lies here.
Excuse me for being personal but my grand father Tatsuo Ninagawa, a moralist too wrote “History of Japanese Bushido” at that time published by Hakubunkan. He wrote grandiosely “Since the Russo-Japanese war, research on Bushido is a matter of great importance for everyone from politicians to businessmen, military-men and scholars”. He wrote in the conclusion that righteousness, integrity, honesty and valor ought to be practiced in business and it amounts to the so-called ‘gentleman-ship’ of the British. Indeed, isn’t it similar to ‘compliance’ in the corporate world in today’s jargon?

Publisher
Masao Ninagawa